Pilat winter raidlight Trail (pfff compliqué ce nom, RTT c'était mieux)
Lorsque j’arrive au gymnase de Marlhes ce dimanche matin il est pas loin de 8h00 et la météo semble conciliante. Tout semble donc partir sur de bonnes bases. Tout ou presque du moins. Car la nuit a été courte (merci les enfants, vous le payerez :o))) et j’ai encore le dos en bouillie de la veille, la faute à 2 séances de 2h30 passées à poncer les poutres à la maison. Le genre de truc qui vous fait vous demander pourquoi bon sang de bonsoir les ponceuses à main sont si lourdes sous la loi de la gravité.
Le gymnase se remplit petit à petit. Mon beau père va récupérer son dossard sur le 22km et je récupère le mien sur le 33km. Je suis super content d’être là. Cette ambiance précédent la course est toujours sympathique. Et puis mon premier dossard de l’année, je vais l’épingler ce dimanche 24 janvier. Alors que l’an dernier, j’avais du attendre le 24… mai ! C’est pas pour dire mais ça fait rudement plaisir d’être au départ de ce premier rendez vous de la saison. Enfin, rendez-vous, il faut le dire vite. C’est une course plaisir, sans objectif autre que de manger la tartiflette d’arrivée et boire la traditionnelle binouze d’après course avec les copains. Ce qui est déjà très bien.
Première surprise en jetant un œil au profil du parcours : le dénivelé annoncé de 1600m D+ est passé à 1000m D+. Sur le coup je suis déçu. Ce que je cherche, dans le cadre de la prépa à l’Occitane, c’est de bouffer du D+. Et j’aurais pas craché sur 600m D+ supplémentaires. M’enfin bon c’est pas grave. D’un autre côté j’avoue qu’il me tarde d’arriver à la semaine d’assimilation, j’ai pas donné ma part au chien depuis le 1er janvier.
Sur ces considérations hautement stratégiques je vois arriver la silhouette svelte et élancée d’Arthur. On papote, on hésite à aller réveiller Taz qui est dans son camping car sur le parking avec toute sa smala. Et puis je rencontre le sympathique Hervé sur le blog duquel je vais depuis quelques temps. Je croise Philippe et son fils qui vont courir sur le 33, on a juste le temps d’échanger un mot. Benoit Laval nous dit qu’il va faire bon, j’en déduis qu’on pourrait courir en tongues et en short mais je ne vais pas m’y aventurer pour autant. Faudrait quand même essayer des YakTrax sur des tongues, ça aurait un côté innovant et rock and roll qui ne serait pas pour me déplaire…
9h00. C’est l’heure du départ du 33. Taz, Arthur et moi-même nous serrons les coudes (j’ai bien dit coudes avec un D) pour une photo de groupe, madame Taz y va de la sienne. Mon F305 décide de faire la grève. C’est marrant, ça m’était déjà arrivé une fois, en 2008 lors de l’Ambertrail : j’arrive avec le Garmin chargé à ras et quand je le branche : « piles faibles » et il se met en carafe direct, batterie totalement à plat. Bon, j’ai tout juste le temps de ranger ceinture cardio et le 305 dans la poche du sac. Pour une fois on va courir au feeling ; après tout ça peut pas faire de mal !
Le départ est donné, on est dans le fond, à côté de la fenêtre et à proximité du radiateur. Ça papote ça papote et le parcours démarre gentiment par une petite descente dans le goudron, avec de la neige tassée. Bref, c’est mignon tout plein. Mais je suis pas dans mon assiette, je sens qu’il y a un truc qui foire du côté de mes intestins. Je prends un peu d’avance sur Taz et Arthur avec dans l’idée de trouver un coin sympathique pour y poser mon auguste séant et alléger mes intestins comme il se doit. Il me faut pourtant attendre un petit moment car je ne montre mes fesses au public qu’en de rares occasions et la piste est étroite, trop dangereux pour mon intimité. J’accélère donc, commence à doubler un, deux puis des poignées de concurrents. Pas facile d’ailleurs de doubler dans la neige. On s’écarte de la trace et hop c’est dans la poudreuse qu’on s’enfonce ! Comme je suis bien élevé, j’essaye de passer au large pour ne pas gêner les autres coureurs. Et j’accélère encore car je repère un petit bois au loin qui me semble pas mal pour un tête à tête bucolique. La piste bifurque sur une petite bosse sur la droite, je prends à gauche et vise un bel arbre qui ne s’offusquera pas d’un peu d’engrais naturel. Je déboule sous les arbres à fond les ballons, enterre la hache de guerre entre mes boyaux et moi. Soulagés, mes intestins me lancent un « go ! go ! go ! » que n’auraient pas reniés les G.I. vomis par les hélicos de l’oncle Sam sur Saïgon en 1975.
Persuadés que mes compères ont continué, je me lance alors à leur poursuite. Je comprendrai plus tard qu’ils étaient derrière… Je ne suis pas lent à comprendre, mais il faut m’expliquer longtemps. Ce n’est qu’arrivé au premier ravito que je déciderai de faire la course à mon rythme, ayant perdu toute notion de temps. Faut dire que sans montre, sans chrono, sans chemise, sans pantalon, euh non, je m’égare… Bref je suis à la rue, incapable de savoir depuis quand nous sommes partis. Je me doute que Taz et Arthur sont derrière mais je décide de continuer. Trop d’incertitudes à les attendre. Sans compter que je commence à avoir mal au dos, les acrobaties de bricolage de la veille se rappellent à mon bon souvenir. Je prends la décision de ne pas m’éterniser.
Rapidement les premiers du 22 km qui s’élançait 30’ après nous nous rejoignent. Je comprendrai ensuite qu’il s’agissait d’eux (faut m’expliquer longtemps que je vous dis !) parce que sur le coup, j’ai vu trois ou quatre types en vrac, à doubler comme des flèches sur des portions carrément pas prévues pour. Bilan : deux chutes devant moi, on se croirait sur les pavés de Paris Roubaix. Faut dire que les garçons ne prennent pas de gants pour s’imposer et passer. C’est même limite.
Faut dire qu’à ce moment là je commence à fatiguer un peu. Nous approchons de la mi-course (je ne le sais pas, mais je le demande à un gars qui me dit avoir 15 kms à son GPS de poignet) et les longs passages dans la neige poudreuse ont laissé des traces (pas que dans la neige). Purée c’est physique ce truc là mais les jambes répondent. Je décide de me calmer un peu et de profiter.
Arrêts photos, un lac gelé, un paysage embelli par un timide rayon de soleil. C’est pour ça qu’on est venu. Je discute avec les gars qui m’encadrent, puis me mets dans la foulée d’une triathlète (c’est marqué sur son tee shirt) qui avance bien. On déconne un moment puis c’est le second ravito. Je m’arrête vite fait, demande s’il y a du vin rouge pour faire passer le saucisson, rigole avec les bénévoles puis je pars dans les traces d’un centurion romain au déguisement très classe. J’aurais appris que les centurions portaient des XT Wings, c’est un truc qu’Uderzo et Goscinny n’avaient pas précisé dans Astérix…
Le petit groupe qui se forme dans la petite bosse monte à son rythme. Je me cale sur les derniers et remonte petit à petit. J’ai les jambes dans un bon état. Je me sens bien, je n’ai aucune idée du kilométrage restant à faire, je n’ai pas le profil en tête, je cours au feeling et ça fait un bien fou. Je discute avec un peu tout le monde, ça doit être soulant pour eux. Y’a même un chien qui court avec nous depuis que nous sommes passés devant un ferme. Et il a la pêche le garçon avec ses 4 pattes. Dans un raidillon court mais velu, il nous met 100 mètres dans une accélération digne de Marco Pantani sur une étape de montagne de la grande époque. Pour la petite histoire et avant que je n’oublie de le préciser, je tordrai finalement le chien qui passera la ligne d’arrivée environ 10 minutes après moi (véridique : le chien a passé le portail d’arrivée ! )
Un peu avant le dernier ravito, le parcours du 22 et du 33 se rejoignent. Je guette si j’aperçois mon beau-père (qui ratera finalement d’un souffle le podium catégorie V3, comme très souvent d’ailleurs) mais je fais chou blanc (ce qui est logique vu la quantité de neige).
La neige justement, elle est très largement praticable. Rien à voir avec le début de course, où l’on s’enfonçait joyeusement dans de la poudreuse qui vous immobilisait par terre à chaque foulée. Où il était impossible de courir (sauf en descente et là c’était le grand pied). J’ai hâte d’en finir, et je demande à un gars combien il reste. Il me dit 8 kms maxi. Je me sens tellement bien que je me mets à courir partout, dans les petites côtes y compris. Je ressens cette même hilarité que j’avais connue lors de la fin de l’Ultra Trail du Sancy. L’impression qu’on va pouvoir continuer des heures durant, qu’on est bien, le cœur tranquille, les jambes qui déroulent. On se sent en alchimie avec les autres qu’on salue, avec la nature qu’on aime et avec son corps qu’on remercie pour sa tolérance.
Et j’avoue que sur les 5 derniers km je vais me lâcher. A la moindre descente je me lance à toute vitesse dans la pente, je pense à un zéro de la seconde guerre mondiale qui prend pour cible un porte avion ricain. Sauf que là, pas de cible, je dépasse des concurrents du 22 et du 33 en passant sur le côté, je m’enfonce dans la neige profonde avec une joie de gosse. C’est du bonheur brut, des vagues de joie immense qui déferlent dans l’estomac et là pas besoin de pause intestinale, y’a juste à savourer…
Je ne me suis pas arrête au dernier ravito, j’ai continué sur le même rythme, indifférent au kilométrage restant, navigant à vue en veillant à ne pas tomber et à ne pas me flinguer une cheville (à mi parcours je me suis arrêté auprès d’un gars qui s’était foulé la cheville pour lui proposer à manger ou à boire, ou tout simplement de l’aide mais il a continué et finalement je l’ai vu passer le portique d’arrivée).
C’est presque avec surprise que j’aperçois l’église de Marlhes. Je pensais qu’il restait encore 2 ou 3 kms mais on y est. J’allonge la foulée, me disant que je n’ai pas fait de séance de seuil cette semaine (juste un peu de seuil au cardio dans une côte) alors j’envoie du lourd et finit avec une sensation de grande joie cette première course de la saison. 3h42 au chronomètre officiel, avec le Garmin au fond de la poche du sac qui a fait 33 kms les doigts de pieds en éventail… Y’en a qui s’en font pas, je vous jure ! J’espère qu’il va ne pas me refaire le même coup pour l’Occitane. Mais cette fois j’emporterai le chargeur portable USB pour parer au problème.
Je marche jusqu’à mes affaires, grimpe en haut des marches du gymnase et retrouve Hervé en pleine séance d’étirements, on papote un peu ; ça fait plaisir de voir que ça s’est bien passé pour lui sur le 22. De mon côté, j’ai bien besoin d’une douche. Après un tour par la case décrassage, je discute rapidement avec mon beau père qui est déjà en train de manger (c’est ça l’expérience des V3). Ensuite c’est à notre tour de faire la queue pour aller manger une tartiflette fort à propos. J’en profite pour boire ma bouteille de St Yorre syndicale. Je tombe par hasard sur Bernard, que j’ai rencontré lors de la reconnaissance de la 6666 début janvier. Ça fait plaisir de voir des gens de chez moi ;)) Il me présente Maryline qui vient de remporter la course féminine du 33 km, excusez du peu... On discute de mon autre pays, d’adoption celui-ci : le pays de l’Arbresle. Voilà que Taz et Arthur nous rejoignent pour la tartiflette suivie de sa traditionnelle bière. Je m’excuse auprès d’eux pour le coup de Trafalgar du départ (il s’agit même d’un coup de trafalzar !). Et j’ai une pensée pour Jean Mik qui devait faire cette course, j’espère prendre bientôt le départ d’un trail avec toi mon gars ;)
Après la bière, on papote encore (devinez de quoi…) et finalement je pars à 14h50 sans mollir car j’ai rendez vous à 16h00 avec mon téléviseur et sans les gosses pour le match décisif Stade Toulousain / Sale (qui verra la victoire des toulousains, ouf, un week end qui s’achève vraiment bien).
Maintenant, place à une petite semaine d’assimilation sans intensité ni volume dans les sorties ; voilà qui va faire du bien avant la suite du programme !